Quand l’art passe à table
Ce soir-là, la table n’était pas sage.
Elle vibrait, elle dessinait, elle racontait.
Cette soirée spéciale, dédiée à l’esprit libre et jubilatoire de Jean Tinguely, fut pensée comme une machine vivante : un assemblage de saveurs, de formes, de traits et d’audace. Une œuvre éphémère, à manger des yeux avant de la dévorer du palais.
Bernadette devait être là, aux côtés de Chantal et Sabine, pour imaginer et façonner ce menu-hommage. Le sort — sous la forme d’un virus aussi sournois qu’un engrenage grippé — en a décidé autrement. Clouée au lit, absente physiquement… mais omniprésente artistiquement.
Car Bernadette n’a pas renoncé.
Elle a laissé une empreinte magistrale.
Une trace indélébile.
La nappe, dessinée entièrement à la main pour l’occasion, est devenue le cœur battant de la soirée. Une cartographie joyeusement chaotique, faite de cercles, de flèches, de couleurs en mouvement — un terrain de jeu graphique où l’esprit de Tinguely semblait circuler librement, ricanant entre deux spirales.
Quant au menu…
Même Jean aurait tiré sa chaise.
Des alliances franches, généreuses, sans compromis. Des plats qui osent, qui assemblent, qui surprennent — exactement ce qu’il aimait : le goût franc, la matière, l’intelligence joyeuse. Rien de figé, tout en mouvement.






























